Une voix dans la foule

Je me suis senti attaqué sur mon aspiration à l'écriture. Que cela plaise ou non, écrire fait partie de moi. Que cela déplaise ou dérange ne changera rien à ma relation d'ordre identitaire à l'écriture. Que ceux qui n'aiment pas les gens qui écrivent passent leur chemin, et ne fassent pas semblant d'avoir des sympathies pour moi s'ils ne les ont pas. 

Je me suis senti attaqué sur la part politique de ma personne. Là encore, c'est une part identitaire de ma personne, car je me sens lié aux Autres, indissolublement lié aux Autres "pour le meilleur et pour le pire". Ce lien indissoluble aux Autres, à l'ensemble des êtres humains de cette Terre (tous les êtres humains, ceux dont je me sens proche mais aussi ceux avec qui je ne partage presque rien), me façonne d'emblée en tant que sujet politique. C'est la définition même du politique : ce qui se rapporte aux choix et à l'organisation de la vie en collectivité, la vie avec les autres êtres humains (qui mérite d'être étendu à tous les êtres vivants non humains). Ne me considérant pas comme vivant seul dans ce monde, les questions de nature politique m'intéressent au plus haut point. Elles m'intéressent, elles me concernent, elles m'imposent de réfléchir à mon positionnement en tant que sujet politique. 

Dès lors que l'on se demande comment faire cohabiter plusieurs individus dans un même espace (territoire, espace symbolique, numérique, etc.) - sur quels modes, selon quelles valeurs, quelle organisation, etc. -, on aborde des questions de nature politique. Il me semble donc que si on ne se considère pas seul sur Terre, ces questions s'imposent à nous. C'est la raison pour laquelle je ressens qu'attaquer quelqu'un sur sa qualité d'être politique a quelque chose de très violent : c'est l'attaquer sur sa qualité d'être en relation aux Autres. A mes yeux, nous sommes tous des êtres politiques, actant ou subissant des choix politiques. 

Je me suis senti attaqué sur ma qualité de père. Comme si la vie de tout être humain n'était pas étroitement liée à l'existence des autres, en premier lieu de ses parents. Comme si l'on pouvait dissocier sa propre vie de la filiation. 

Je me suis senti attaqué sur mes fragilités de père. Comme si la parentalité n'était pas un apprentissage. Un beau, un noble, un merveilleux apprentissage, mais un apprentissage difficile. Aucune séance d'entraînement, aucune leçon, aucun enseignement n'apprend et ne prépare réellement à ce que c'est que d'être parent. 

Je me suis senti attaqué sur ma qualité d'homme traversé par des sentiments parfois incertains, parfois contradictoires. Ce type d'attaque n'est-il pas une attaque contre l'humain ?  N'est-ce pas proprement humain que de douter, de se poser des questions, d'avoir des incertitudes ? 

J'aimerais davantage me préserver de ces attaques qui m'affligent et me blessent. J'aimerais les renvoyer à leurs expéditeurs.