Acter l'absence paternelle

Rédigé par Une Voix
Classé dans : Parentalité Mots clés : aucun
Il fallait acter l'absence paternelle dont mon frère et moi sommes victimes. Je l'ai fait par écrit, dans un courrier adressé à mon père le 4 avril dernier. 

J'ai longtemps tourné autour du pot, cherché les mots, cherché comment sortir de la situation familiale délétère issue de ma propre filiation.  

Acter l'absence de mon père dans la vie de ses enfants et petits-enfants n'a pas été chose facile, loin de là. Il y a tant de choses en jeu entre un fils et un père. Ce n'est qu'à l'âge de quarante-et-un ans que j'ai acté cette absence, cette fuite, cet abandon.

Dans la lettre que je lui ai écrite, je parle d'abandon. 

C'est un abandon diffus, non assumé. 

Ce n'est pas un abandon classique, celui d'enfants en bas âge. Nous avons grandi mon frère et moi avec nos deux parents, même si c'était dans un climat familialement irrespirable, toxique et destructeur. 

Il s'agit d'un abandon tardif, non franc et non assumé. Une fuite. Fuite à soi-même, fuite vis-à-vis de ses responsabilités, de ses actes et abandon de ses proches. 

Acter cette absence était vital pour moi. Non seulement parce que j'en souffre, je souffre de ce père absent, ce père qui fuit la responsabilité de ce qu'il est et de ce qu'il fait. Exprimer cette souffrance en s'adressant à ce qui la cause est le premier pas pour évacuer cette souffrance. 

La deuxième raison pour laquelle il était absolument nécessaire d'aborder le sujet de manière franche et ouverte (donc ouvertement conflictuelle), c'est que c'est sans doute la seule façon de ne pas reproduire les mêmes schémas, les mêmes comportements destructeurs. 

Ces schémas, je ne veux pas les reproduire avec ma fille. J'en ai trop souffert moi-même pour imposer quoi que ce soit de semblable à quiconque. À plus forte raison à un enfant. Mon enfant.